Reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur : la déclaration de l’AT n’est pas une condition préalable
La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur n’implique pas que l’accident du travail ait été préalablement déclaré à la caisse dans le délai de deux ans prescrivant l’action.
La société Bati général fait sous-traiter des travaux de couverture. Au cours de ces travaux, le 27 novembre 2008, un salarié fait une chute mortelle de toiture.
Les services de police chargés de l’enquête consignent dans le procès-verbal que la victime se trouvait sur la toiture du bâtiment dont il était occupé à retirer des plaques de fibrociment et ne bénéficiait d’aucune protection individuelle ou collective contre les risques de chute. Le PV mentionne également que les employeurs ne pouvaient ignorer la dangerosité des conditions de travail et qu’ils n’ont pas pris les mesures de protection nécessaires pour protéger le salarié. S’en suivent des poursuites devant le tribunal correctionnel.
Le 16 décembre 2010, le gérant de la société Bati général et le sous-traitant sont pénalement condamnés pour le délit de travail dissimulé et pour délit de prêt illégal de main d’oeuvre.
Le 22 février 2012, la mère de la victime saisit la juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Le gérant de la société Bati général estime que l’action en reconnaissance de la faute inexcusable est prescrite. Pour lui, l’action était recevable jusqu’au 27 novembre 2010, soit dans les deux ans suivant l’accident. Il considère également qu’une faute inexcusable ne peut pas être retenue puisque l’accident du travail n’a pas été déclaré à la caisse dans les deux ans suivant l’accident.
Les juges appliquent l’article L. 431-2 du code de la sécurité sociale : en cas d’accident susceptible d’entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, la prescription biennale opposable aux demandes d’indemnisation complémentaire de la victime ou de ses ayants droit commence à courir à compter de la date de l’accident et se trouve interrompue par l’exercice de l’action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l’action en reconnaissance du caractère professionnel de l’accident.
Ils estiment que si la reconnaissance de la faute inexcusable ne peut être retenue qu’en cas d’accident du travail, elle est indépendante de la prise en charge au titre de la législation professionnelle et n’implique pas que l’accident ait été préalablement déclaré à la caisse dans le délai de deux ans.
Ainsi, la demande de reconnaissance de la faute inexcusable est recevable puisqu’elle est intervenue dans les deux ans suivant le jugement du tribunal correctionnel. Le jugement étant intervenu le 16 décembre 2010, la mère de la victime avait jusqu’au 15 décembre 2012 pour agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Le gérant de la société Bati général et le sous-traitant sont condamnés solidairement à rembourser à la CPAM la somme qu’elle est tenue de verser à la mère de la victime en indemnisation de son préjudice moral, soit 30 000 euros.
Source : Éditions Législatives
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